Jorja Smith : la nouvelle reine de la soul
- Camille
- 12 oct. 2018
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 14 sept. 2020

Par Camille Buonanno
Jeune, belle, talentueuse, charismatique, et malgré tout d’une humilité profonde Jorja Smith coche toutes les cases pour attiser la jalousie de tout à chacun et pourtant il est quasiment impossible de résister à son charme. Cet article pourrait se résumer en une seule phrase claire et concise : Jorja Smith à une voix incroyablement envoûtante et divine. Vous trouverez peut être que cette introduction manque de neutralité journalistique (ce que je ne peux nier mais entre nous cette neutralité n’existe pas et je ne suis pas encore journaliste, je peux donc continuer mon éloge en toute tranquillité).
Originaire de Walsall petite ville britannique, située dans le comté des Midlands de l'Ouest à 200 kilomètres de Londres, Jorja voit le jour le 11 juin 1997 dans une famille d'origine sénégalaise. Ado, elle bénéficie dans sa jeunesse d'une formation classique de chanteuse pendant ses études secondaires, elle y apprend le haut-bois puis fait partie d'un collectif de musique, OGHORSE, et commence à publier de la musique en ligne. Son père, né à Gloucester, au Royaume-Un, a fait partie d'un groupe néo-soul appelé 2nd Naicha. La musique est donc un univers dans lequel elle évolue dès le plus jeune âge.
Ses influences musicales sont diverses : jazz, hip-hop et rythmes électroniques grondants, allant d’Amy Winehouse dont elle est une fan inconditionnelle à Dizzee Rascal, de son vrai nom Dylan Mills rappeur, singer, songwriter, producteur originaire du district de Bow dans l'est de Londres, instigateur d'un nouveau genre musical émergent depuis quelques années de la banlieue sud et est de Londres appelé grime (« raclure » en anglais). En effet, ce dernier est une influence directe (notamment avec la chanson “Sirens”) de son morceau “Blue Lights” sorti en 2016 qui sera un premier pas vers le succès. Cet extrait de son premier EP Projet 11, sorti en indé la même année évoque de manière émouvante et tristement authentique les brutalités policières vis à vis des populations de couleurs. "Blue Lights" a donc reçu des critiques élogieuses lors de sa sortie pour ses paroles introspectives mais aussi grâce aux co-signatures de Skrillex et Stormzy ont contribué à sa montée en popularité. Il a également été présenté dans le seizième épisode d'OVO Sound Radio.
OVO (et plus particulièrement son fondateur) a contribué à son ascension fulgurante. Drake a indéniablement joué un rôle important à cet égard, la mettant en vedette deux fois sur sa mixtape "More Life". Si Jorja se serait probablement hissée au moins jusqu'au succès national du Royaume-Uni de toute façon, cette mise en valeur lui a permis d’étendre l’horizon de ses collaborations à d’autres artistes qualifiés de “légendes vivantes” tel que Kendrick Lamar. La jeune chanteuse à peine âgée de 20 ans se voit obtenir un featuring sur le projet "Black Panthers" du célébrissime rappeur américain.
En juin 2018, elle va alors utiliser intelligemment le fait que les projecteurs soient tous braqués sur elle pour sortir son premier album "Lost and Found", qui (comme on pouvait le prévoir) connaît un succès largement mesurable (Jorja reste dans le top 10 des artistes les plus écoutés sur spotify durant tout le mois de juin). Ce projet prend le contre pied de la tendance actuelle car parsemé de chansons à tempo lent.
L’influence d’Amy est largement ressentie sur des morceaux comme "February 3rd" et single "Teenage Fantasy". Mais c’est avec une parfaite maîtrise de ses cordes vocales qu’elle nous offre de belles trilles tirant vers le RnB ou la soul sur des sons avec une production pianistique nettement plus lourde comme “Tomorrow”. Cette capacité à naviguer entre différents horizons et univers musicaux tout en gardant son identité (et surtout sa voix cristalline) donne à l’album une texture tout à fait particulière qui lui permet de s’imposer et de se détacher des autres projets sortants. Par ailleurs si sa voix reste la même depuis son dernier projet, son écriture a indéniablement mûri. Son single “On my mind" transpire la maturité et l’expérience ce qui contraste avec la jeunesse de la chanteuse prodige.
Si la comparaison faite par le journaliste de Noisey à Adèle semble quelque peu paresseuse elle est néanmoins explicable et justifiée sur de nombreux aspects. La précocité de la chanteuse, sa fulgurante ascension, son origine modeste ainsi que l’amour qu’elle suscite sur l’autre côté de l'Atlantique. Leur force réside dans leur capacité d'enchanter tout le monde, d'un adolescent qui traverse sa première rupture jusqu'à un oncle qui aime juste monter une ballade sur son chemin du retour du travail.
Bien que son grain de voix et son amour pour le jazz et la soul la rapproche d’Amy Winehouse elle ne partage l’histoire tragique de son idole, dont le succès s’est vraiment fait ressentir lorsque Amy a commencé à mêler ses sonorités mélancoliques avec des paroles et des thèmes plus sombres. Si les styles musicaux varient sur l’album les thématiques restent centrées autour d’histoires adolescentes. Avec ses allures de journal intime saupoudré de réflexions et d’un recul relativement mature l’album n’abordent pas de thématiques plus profondes et c’est un peu la seule choses qui manquent au tableau de la jeune artiste qui nous avait vendu du rêve avec des morceaux comme “Beautiful Little Fools” (phrase tirée de Gatsby Le Magnifique) aux résonances féministes ou “Blue Lights” criant de vérité dénonçant les violences policières.
Cependant, loin de moi l’idée de critiquer ses choix artistiques, sa carrière n’en est qu’à la genèse et cette chanteuse qui réagit de manière calme et réfléchie au succès (“Je ne prévois rien pour ne pas être déçue.” avoue-t-elle sereinement au magazine Crack) a encore de quoi nous surprendre et nous émerveiller dans les années à venir.
Titre préféré : A Prince (en plus il est pas très connu c’est pratique pour ceux qui veulent se la péter sans avoir trop à chercher)
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